J’ai le souvenir d’un été de mon adolescence, où j’étais en plein questionnement sur mon identité et ma place dans le monde. J’étais en vacances en France avec ma famille, et ma maman avait avec elle un livre de contes – pas une version pour enfants avec des images, mais un livre sérieux ( 🙂 ), avec des contes qui font réfléchir et des analyses qui proposent d’aller plus loin.

Dans un contexte qui s’y prêtait, ma mère et moi avons lu ensemble le conte du Vilain Petit Canard. Je connaissais l’histoire, mais du haut de ma fragile adolescence, le texte m’a ému et touché. On a pleuré tous les deux. Depuis, cette histoire me tient particulièrement à cœur – et les termes “canard” et “cygne” sont devenus des vocables récurrents dans ma famille, comme métaphores pour décrire les situations où quelqu’un se sent, pour les mauvaises raisons, inadéquat par rapport à son environnement.

L’histoire du Vilain Petit Canard me trottait d’ailleurs à ce point en tête que j’avais déjà entrepris, il y a plusieurs années, d’en coucher sur le papier une version écrite en vers. C’était (juste) avant les tout premiers débuts de Verbatim, et le format que j’avais choisi était dès lors bien différent d’un “rap” – avec des alexandrins, et un respect plus strict des conventions poétiques classiques. (C’est d’ailleurs sans doute parce que je m’étais imposé ce cadre un peu trop restrictif que je n’ai à ce jour toujours pas terminé cette version du texte…) 🙂 En voici un aperçu:

Dans notre société, les exclus sont légion ;
Tant de gens rejetés, pour autant de raisons.
Ou trop vieux, ou trop lourd, ou trop lent, ou trop vif
– C’est un mauvais concours sans critère objectif.
Ce n’est point le hasard qui règne, cependant :
Si l’on est à l’écart, c’est qu’on est différent !
Messieurs, dames, avouez, mieux vaut être conforme ;
C’est par commodité qu’on se plie à la norme.
Mais prêtez, à présent, l’oreille à celui-là,
Qui naquit où les gens ne lui ressemblaient pas.

Il était une fois, aux abords d’une mare,
Le plus commun qui soit : un couple de canards.
Or, un jour, il advint que la Cane annonça
Au Malard, son conjoint, qu’il deviendrait papa.
Amoureux et comblés, ils plièrent bagage,
S’en allant rechercher dans les proches parages
Un endroit verdoyant, à l’air pur, et propice
A voir naître un enfant. Devant une onde lisse
– Réel lieu de plaisance – ils construisirent un nid,
Attendant que commence une nouvelle vie.

(Ce sont là les deux premières strophes. J’avais prévu d’en écrire dix, de dix alexandrins chacune, rimant à l’hémistiche, et à ce jour, je n’ai encore jamais dépassé la moitié de la sixième… Mais il n’est pas exclu que je termine quand même ce texte un jour. 🙂 )

Or, pendant mon récent voyage dans les Amériques, début 2019, j’ai pris beaucoup de temps pour développer mon projet Verbatim, et pour écrire un maximum de nouveaux textes (profitant de l’inspiration que me conféraient mes aventures). Suivant le modèle de ma Fable des Deux Chasseurs – que j’avais écrite juste avant de partir – et son style beaucoup plus libre, je me suis re-penché sur ma cane, mon canard, et leur vilain petit rejeton. Ainsi, petit à petit, entre le Pérou, la Colombie et la côte ouest des Etats-Unis, ma “Fable du Vilain Petit Canard” a vu le jour. C’est le résultat de ce travail que je vous présente ci-dessus. 😉

A vous de me dire à présent ce que vous en pensez! Je trouve le sujet plutôt universel, en tout cas, et je serais surpris qu’il laisse quiconque complètement indifférent. Ne sommes-nous pas tous parfois, en fonction des circonstances, dans un cadre ou un autre, des cygnes parmi les canards, à la recherche de nos pairs?

Et puis si toi qui lis ceci – cygne, canard, ou toute autre sorte d’animal! 🙂 – tu as envie de collaborer avec moi sur ce texte en le mettant en musique, n’hésite pas une seconde, et contacte-moi sans tarder sur ma page facebook!